Suisse et Tadjikistan: deux décennies d’apprentissage permanent
Après plus de vingt ans, s’achève le partenariat entre la Suisse et le Tadjikistan dans le secteur de la santé. Nul besoin d’aller jusqu’en Asie pour connaître les détails de cette longue histoire. En Suisse, deux médecins travaillant dans le cadre des programmes de coopération destinés à la formation du personnel médical nous racontent leurs expériences. Le travail collaboratif entre professionnels a donné une impulsion importante au changement.

Cette année, la division Eurasie de la Direction du développement et de la coopération (DDC) se livre à un inventaire de ses activités: 2021 marque en effet le trentième anniversaire de la collaboration entre la Suisse et les pays de l’ex-Union soviétique. Parmi ces derniers se trouve le Tadjikistan. Le partenariat que la Suisse et ce pays ont noué dans le secteur de la santé vient de s’achever.
Aujourd’hui, il reste encore de nombreux défis à relever mais d’importants objectifs ont été réalisés grâce, notamment, à la coopération internationale. Cette collaboration de longue haleine a contribué en effet à l’obtention de résultats importants, comme l’introduction du modèle du médecin de famille. Au cours des 20 dernières années, la DDC a investi environ 44 millions de francs dans 12 projets dans des domaines spécifiques tels que la formation médicale. La DDC est intervenue sur plusieurs fronts pour aider le gouvernement tadjik à renforcer son système sanitaire. Dans les établissements de santé par exemple, les programmes mis sur pied visaient à promouvoir des services intégrés et mieux adaptés aux besoins des patients. Au niveau légal et normatif, la DDC a soutenu l’élaboration de nouvelles lois pour favoriser la pratique de la médecine générale et réglementer le travail des médecins de famille.
Les activités menées dans le domaine de la formation (universitaire, post-universitaire et continue) ont joué un rôle essentiel. Les projets ont été réalisés et menés par des professionnels de la santé issue des deux pays.
Réforme du système de santé au Tadjikistan: la valeur ajoutée de la formation
Après l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, le Tadjikistan est entré dans une phase de transition. Le pays, qui compte aujourd’hui une population d'environ 9,5 millions d'habitants, a dû faire face à d’importants défis, notamment dans la réforme de son système de santé.
A l’époque de l’Union soviétique, un système de base de santé avait déjà été mis en place: dans chaque village se trouvait un ou plusieurs «point(s) de référence» avec au moins une sage-femme et un «Feldscher» (mot russe d’origine allemande), qui signifie le personnel médical très bien formé et responsable des soins primaires. Le financement de ces personnes n'étant plus assuré, beaucoup ont émigré, notamment en Russie ou vers d'autres professions. La guerre civile entre 1992 et 1997 et la dégradation de l’enseignement universitaire ont aussi influencé cette migration. De plus, ce système n'était pas connu aux yeux des communautés internationales. C’est pourquoi, celles-ci, en coopération avec le gouvernement tadjik, ont défini une stratégie nationale qui visait à introduire, d’ici 2020, un système basé sur la médecine générale, qui, au départ, était totalement inconnu de la population locale.
Dans le cadre du projet «Medical Education Reform» mené par le ministère tadjik de la santé, la DDC a fait appel à des institutions suisses spécialisées, à l’instar de l’Institut tropical et de santé publique suisse (Swiss TPH), pour développer un partenariat avec le gouvernement tadjik et soutenir la réforme du système éducatif des médecins et des infirmiers de soins primaires. Des experts issus des deux pays ont donc travaillé en étroite collaboration et développé ainsi des relations professionnelles basées sur la confiance mutuelle. Ce réseau de partage des connaissances est encore renforcé par l’engagement personnel des acteurs impliqués, qui s’efforcent de stimuler l’introduction de nouvelles pratiques, approches et méthodologies. Travailler ensemble sur des changements systémiques: pour la DDC c’est un facteur clé, qui influence la pérennité de la réforme aussi dans le futur.

Ligne directe entre médecins de famille
Renato Galeazzi, ancien chef du service de médecine interne de l’Hôpital cantonal de Saint-Gall, est l’un de ces experts. Une fois à la retraite, il s’est consacré à son travail de consultant pour le Tadjikistan. À ce titre, il était chargé d’évaluer la qualité du projet de réforme. Professeurs, médecins, infirmiers, stagiaires et étudiants: les échanges se sont déroulés à plusieurs niveaux et ont porté sur la comparaison de diagnostics, l’interaction avec les patients ou encore l’organisation du travail. Du point de vue du docteur Galeazzi, la communication linguistique, la façon de travailler ou encore les attentes envers la coopération internationale sont autant d’aspects importants à prendre en considération pour «développer avec le temps la confiance mutuelle et trouver un langage commun».

Collaboration entre professionnels
Professeur de médecine internationale et humanitaire auprès des Hôpitaux universitaires de Genève, Louis Loutan a travaillé au Tadjikistan, mais surtout au Kirghizistan pendant de nombreuses années. Dans ce pays qui ressemble au Tadjikistan par son histoire, et par la nature des programmes de coopération qui y sont menés dans le secteur de la santé, Louis Loutan a dirigé un projet destiné à la réforme de la formation médicale. Selon le professeur, le point fort du programme ne réside pas uniquement dans les réformes structurelles, mais également dans les échanges entre collègues experts médecins: « Nous partageons le même métier et sommes donc confrontés aux mêmes problèmes, dans des environnements différents » explique le professeur.
Coopération internationale
Basée sur la Stratégie de politique extérieure (SPE) de la Confédération, la coopération internationale de la Suisse (CI) vise à lutter contre la pauvreté et à favoriser le développement durable dans les pays en développement. La santé est un facteur essentiel du développement: l’engagement de la DDC dans le domaine de la santé porte en premier lieu sur le renforcement des systèmes de santé, sur la lutte contre les maladies transmissibles et non transmissibles, ainsi que sur l’amélioration de la santé sexuelle, reproductive, maternelle, néonatale et infantile.
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